Claire Demoulin | Doctorante boursière

Ancien Membre
Mobilités, Migrations, Recomposition des espaces
Centre Marc Bloch, Friedrichstraße 191, D-10117 Berlin
Email: claire_demoulin  ( at )  hotmail.fr Tél: +49(0) 30 / 20 93 70700


Titre de la thèse
La biographie filmée chez William Dieterle (1935-1942) - Migrations, circulations culturelles et tribunes cinématographiques.
Résumé de la thèse

La thèse en cours porte sur des circulations culturelles transatlantiques (France-Allemagne-USA) de l’entre-deux-guerres en prenant pour point d’observation l’émergence de la biographie filmée à Hollywood et le cinéaste allemand émigré auquel on y attribue la paternité, William Dieterle. 

Mes recherches visent également à préciser le rôle de William Dieterle en tant que connecteur central auprès des artistes et intellectuels allemands émigrés en Californie. Ses biopics se rapprochent sensiblement des biographies historiques rédigées par les écrivains germaniques au cours de leur exil américain, au point que les deux supports, filmiques et littéraires, partagent une perspective commune du sujet historique comme mode d’adresse au contemporain. Précisément marqués par l’exil et l’engagement des années 1930- 1940, les films de William Dieterle constituent des tribunes cinématographiques qui répondent à la montée des fascismes en Europe.

Le recours au biographique vise alors un triple objectif. Les biopics assurent la patrimonialisation, voire la réhabilitation de certains pans d’une culture européenne en partie spoliée. Ils élaborent des stratégies narratives en réponse à la neutralité officiellement imposée par Hollywood. Enfin, la dialectique qui articule temps passé et présent ravive une fonction de l’histoire comme adresse au contemporain, souvent mobilisée par le regards caméra dans les scènes finales. Chaque film engage des notions d’héritage, d’universalisme et de responsabilité qui traversent ces ‘grands hommes’, habitent des personnages devenus orateurs-héros pour interroger le passage d’une prise de parole filmée à ce qui constituerait un acte de parole du film.

Organisation de manifestations

6 -7 juin 2019 : Co-organisation du colloque international "La rhétorique filmée : France, Allemagne, USA" avec Guillaume Cot (doctorant P8), Mathias Lavin (HDR P8) et Jennifer Verraes (MCF P8)

L’objectif de colloque international est de mettre en perspective une véritable culture de l’éloquence qui aurait nourri le cinéma et le théâtre – en privilégiant la première partie du XXe siècle. Il devrait interroger les façons dont les codes de l’art oratoire ont pu imprégner ces deux formes artistiques, les liens artistiques et médiatiques qui ont pu aider à ces échanges, et questionner les modalités de la rhétorique filmée ou représentée.

14 octobre 2018 : Les 21e Rendez-vous d'histoire de Blois, co-roganisation de la table ronde "Mettre la révolte en images. Projet(s) cinématographiques et politiques" avec Anne Bellon (CESSP)

La table ronde « Mettre la révolte en images. Projet(s) cinématographiques et politiques » examinera des films de fiction dont les thèmes, la proposition formelle et les discours sont particulièrement marqués par la notion de révolte. Qu’elles renvoient à un passé proche ou lointain, à un future plausible, qu’elles dépeignent la censure américaine, les Civil Right, les tensions de 1968 ou encore l’ordre établi, ces images conjuguent au présent des formes variées du soulèvement. Images mythifiées, fictionnalisées et toujours actualisées, des chercheurs en sciences sociales et en études cinématographiques croiseront leurs analyses pour interroger le sens de ces multiples réappropriations de la révolte.

2016 - 2018 : Contribution à la programmation du Festival des 3 Continents de Nantes - section Exil(s) : devenir étranger, avec Gérôme Baron (F3C), Anne Kerlan (CNRS), Mélisande Léventopoulos (MCF P8), José Quental (Doctorant P8) et Claire Allouche (Doctorante P8)

L’équipe élabore une section de la programmation du festival à travers une sélection de films, de rencontres et de tables rondes qui interrogent divers aspects de la condition de l’exilé ainsi que l’hétérogénéité des formes de migrations. 

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Publications

DEMOULIN Claire, « Les traversées du jazz au cinéma. Guerre, mobilisation culturelle et question raciale », in : Jazz et Cinéma (dir. Robert Bonamy et Patrick Louguet ), Circav, n°28, 2019.

Cet article s’intéresse à la représentation des Afro-Américains dans les musicals de jazz produits entre 1941-1943, ainsi qu’à la fonction de mobilisation culturelle que ces films remplissent en tant que support à l’intégration des minorités. En étudiant la complémentarité entre le jazz et l’accompagnement des troupes au combat dans le contexte d’un effort de guerre, il s’agit d’examiner comment les notes du jazz et les représentations mythiques de cette musique renforcent l’un des substrats fondamentaux d’une culture de guerre fédératrice. L’originalité de cet article réside dans l’articulation entre la production des artistes émigrés allemands et l’attention qu’ils portent à la question raciale. En analysant une rhétorique répétée de la « contribution » des minorités, des formes de rapprochements possibles s’établissent entre les deux communautés et retracent des transferts politiques et culturels antérieurs. Dans l’épreuve de la guerre, les « remontées du jazz » au cinéma montrent autrement les mécaniques d’intégration à l’œuvre dansla société américaine et l’espace transatlantique de l’entre-deux-guerres. L’analyse triangulaire du jazz filmé/question raciale/contexte de guerre propre aux films que nous avons retenus expose une histoire, en miroir, des discriminations raciales et des assimilations culturelles entre Etats-Unis et Europe.

 

DEMOULIN Claire, « Is Pasteur American? (The Story of Louis Pasteur, William Dieterle, 1936): from 19th-century laboratories to 20th-century trials: a transnational perspective. In : West of Everything, New Media,Visual Culture and Law, Edimbourg University Press, Edimbourg, 2019.

En empruntant au portrait de Pasteur peint par Albert Edelfelt, The Story of Louis Pasteur examine les analogies entre artistes et scientifiques alors que l’image de Pasteur circule dans l’environnement visuel américain d’un premier 20e siècle, et qu’il s’établit à mesure de circulations, de transferts et  d’hybridations culturelles entre Europe et Etats-Unis. Ce que Pasteur représente en termes de changement social – ici impulsé par l’avancée de la microbiologie - devient le sujet principal du film au bénéfice de la dramatisation de nouveaux agents : les microbes. Le combat en vue du progrès, contre les positions obscurantistes et contre les bactéries se déploie au cours de scènes de procès, qui tout en reproduisant des codes rhétoriques anciens au sien d’un genre cinématographique nouveau – le biopic-, vise à affirmer la place du scientifique dans le théâtre de la justice sociale. Le cadre juridique devient le lieu d’une tribune cinématographique où les orateur-héros, en regards caméra face à 1936, interrogent autant la responsabilité du scientifique qu’il ne replace le film dans les pratiques sanitaires et les mesures de santé publique entreprises dans les Etats-Unis de l’entre-deux-guerres.

 

CASETTI Francesco, « Sur le statut de l’écran » (trad. DEMOULIN Claire), Des pouvoirs des écrans, Mauro Carbone, Anna Caterina Dalmasso, Jacopo Bodini (ed.), Editions mimésis images, mediums, 2018, p.53-68.

 

DEMOULIN Claire, « Weinstein, le producteur et la femme-produit », Libé des historien.nes (dir. Michelle Perrot) https://www.liberation.fr/planete/2018/10/10/affaire-weinstein-le-producteur-et-la-femme-produit_1684514

 

DEMOULIN Claire, ‘Seul un mot nous sépare’. Juarez, 1939 (William Dieterle), « Le film historique », L’Art du Cinéma, n°94, été 2017

Juarez contourne les modalités habituelles de l’écriture biographique pour dresser le portrait historique du second empire mexicain (1864-1867). Si la représentation des plébiscites et de l’ingérence de Napoléon III, permet au film des analogies avec la situation en Europe, le film se fait l’étendard, à travers son personnage, des idéaux démocratiques universaux ainsi que du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. En exposant une parole engagée, le film appelle à débattre des enjeux contemporains, notamment de l’autodétermination des peuples, et problématise les enjeux de l’interventionnisme américain dans le contexte de la seconde guerre mondiale.

 

DEMOULIN Claire, « Les biopics d’hommes politiques : des « films de discours » ? Croisements esthétiques, rhétoriques et politiques autour du film Le Discours d’un roi », Revue LISA/LISA e-journal [En ligne], vol. XIV-n°2 | 2016, mis en ligne le 13 décembre 2016. URL : http://lisa.revues.org/8988

Cet article vise à définir la place et la fonction des temps consacrés à la prise de parole et aux discours dans les biopics politiques, tant ces moments de la vie publique occupent une place stratégique dans la construction filmique. Si le cinéma figure le corps politique de son héros à travers des temps d’adresse, la mise en scène des discours est également l’occasion de donner à voir les coulisses de la parole. En imaginant les scènes et hors- scènes politiques, les films portent une attention esthétique particulière aux discours des personnages biographiés et interrogent l’articulation du rapport entre réalité et fiction. Au lieu de se limiter à la reprise des formulations célèbres, les biopics étudiés réactivent une parole engagée et dynamique qu’ils arrachent à la légende.